Les DRMs – Un peu de droit

Nous allons présenter dans les paragraphes suivant ce que sont les (DRM) Digital Rights Management, autrement dit en français la gestion des droits numériques (GDN) ou encore la gestion numérique des droits (GND) et pour finir une dernière tout autant utilisée : mesures techniques de protection (MTP).

Dans les faits, les DRMs sont des procédés techniques permettant de limiter l’utilisation d’un contenu numérique dans le but de protéger les droits des ayants droits, comprenons les créateurs du contenu numérique (Majors du disque et artistes associés, créateurs de jeu, artistes, journalistes, etc).

Premier soucis dans la langue de Molière :

Dans la langue Française, qu’est ce qu’une :

  • Mesure technique de protection (MTP). Il s’agit de toute technologie, dispositif ou composant qui dans le cadre normal de son fonctionnement est destiné à empêcher ou à limiter (en ce qui concerne les œuvres ou prestations), les actes non autorisés par les titulaires de droits d’auteur ou de droits voisins. Ici le défaut dans la traduction est l’absence d’indication qu’il s’agit de mesures de protections des droits.
  • Gestion des droits numériques (GDN). Il s’agit par définition de l’ Action de gérer les droits numériques d’autrui et, par extension, ses propres droits numériques. Manière dont on les gère.
  • Gestion numérique des droits (GND). Il s’agit de la définition la plus proche de ce que devrait être les DRMs à proprement parler. Ici, l’ Action de gérer numériquement les droits d’autrui et, par extension, ses propres droits; manière dont on les gère.

En réfléchissant à ces 3 traductions couramment utilisées dans la langue française on comprend bien vite que les DRMs sont une sorte de boîte de pandore imaginée par les industries des contenus numériques et à destination du commun des mortels.

Quelques exemples d’applications des DRMs :

  • Restreindre la lecture du support à :
    • une zone géographique prévue.
    • du matériel spécifique.
    • un constructeur ou vendeur.
  • Restreindre ou empêcher la copie du support.
  • Verrouiller ou restreindre certaines fonctions de lecture du support. Fonction par exemple utile pour obliger l’exposition de l’utilisateur aux annonces publicitaires.
  • Identifier et tatouer numériquement toute œuvre et tout équipement de lecture ou d’enregistrement.

Les supports d’applications des DRMs :

Tout contenu numérique qu’il soit physique ou numérique peut être soumis aux DRMs. Ainsi le contenu d’un Blue-Ray peut inclure des DRMs, ainsi que le Blue-Ray lui même, son lecteur physique et logiciel.

Les DRMs pour les entreprises :

La nécessité pour certaine entreprise est de s’affranchir de la présence de DRMs trop contraignantes pour les utilisateurs. C’est le cas par exemple pour “The Ebook Alternative” une plateforme Française de distribution d’ebooks dédiés aux professionnels.

Les DRMs empêchent bien souvent le transfert d’un support à un autre, les livres n’étant souvent utilisable que sur un appareil bien spécifique. Que ce soit pour le distributeur (libraire, éditeur, site d’e-commerce…) ou pour l’acheteur, la multiplicité des DRMs et les contraintes qui leurs sont liés ont de quoi décourager de se tourner vers les livres numériques.

Ce travail vers l’accessibilité, et l’interopérabilité des contenus que certains voient nécessaire au confort d’utilisation se heurte à deux problèmes. Tout d’abord la nécessité de protéger les contenues et les droits de leurs auteurs malgré cette plus grande flexibilité d’utilisation. Et l’opposition que lui portent certains acteurs de la distribution qui considèrent les solutions actuellement développées comme pas assez dissuasif contre les pirates déjà très bien installés dans le monde numérique.

D’autres entreprises vont au contraire continuer de développer leurs propres systèmes de DRMs. C’est le cas par exemple de Microsoft (Microsoft DRM), de Apple (FairPlay sur Itunes) ou encore les formats pdf ou flash d’Adobe.

Ces entreprises cherchent ainsi à protéger les contenus des auteurs, mais également leurs propres contenus et logiciels. Tout en offrant à leurs clients des solutions complètes du support physique fournit jusqu’au fichier lui même.

Il n’est toutefois pas toujours claire si le but est bien la protection du contenue, ou au contraire un moyen de “fidéliser” les consommateurs en leurs ôtant la possibilité de choisir les applications et les équipements sur lesquels lire leurs contenus une fois acheté.

Quand est-il juridiquement ?

Les atteintes et contournements aux mesures techniques restent sanctionnés au même titre que les contrefaçons. L335-3-2 CPI indique que les peines varient de 3 750 euros d’amendes à six mois d’emprisonnement et 30 000 € d’amendes.

Les DRMs sont le fruit de normes supranationales qui contraignent les états à oeuvrer dans le sens de la norme. L’OMPI, l’organisation mondiale de la propriété intellectuelle a produit des traités le 20 décembre 1996 qui oblige les états signataires à “prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces”.

En Amont et en aval de l’application de ces traités, en France la répression des fraudes continues de se faire au cas par cas pour chaque type de support et contenus suite à des directives (exemple: 91/250 CEE du 14 mai 1991 portant sur les logiciels) ainsi que; et surtout sur le code de la propriété intellectuelle.

La guerre continue opposant les ayants droits aux utilisateurs, les uns à coup de DRMs, les autres à coup de systèmes de contournements pose la question de la recherche d’un équilibre. Et c’est pourquoi la loi de transposition DADVSI du 1er août 2006 consacre la légitimité des mesures techniques aux titulaires de droits sur une œuvre (autre qu’un logiciel) et instaure une Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT).

Finalement on apprend selon des propos rapporté de Numerama par la quadrature du net que : “L’Autorité de Régulation des Mesures Techniques (ARMT) créée par la loi DADVSI pour réguler l’utilisation des DRM a présenté jeudi matin son premier rapport annuel, le dernier avant sa transformation en Haute autorité de diffusion et de protection des oeuvres sur Internet (HADOPI), en cas d’adoption de loi Création et Internet. En vingt mois de fonctionnement, l’Autorité n’a rendu aucune décision, et a constaté que les dispositions pénales de protection des DRM n’ont jamais été mises en oeuvres devant les tribunaux.” On est en donc en droit de se poser la question de l’utilité de la mise en oeuvre de tels protections…

En 2009, la loi DADVSI de 2006 est abrogée en quasi totalité au profit des lois Hadopi. C’est une tentative de régulation de l’outil internet qui se met en place insidieusement, et qui porte atteintes aux libertés fondamentales. Hadopi ajoute à l’arsenal répressif des mesures fortement limitatives des libertés fondamentales : les peines graduées (L335-7 et s.). Ces peines seront aménagées par un juge unique lors d’une procédure simplifiée ce qui laisse subsister des doutes quant aux garanties d’un procès équitable. Pour prévenir le téléchargement illicite le législateur met à la charge du titulaire de l’accès l’obligation de veiller à ce que cette connexion respecte les droits d’auteurs (censuré par le Conseil constitutionnel) et l’obligation des distributeurs d’informer l’utilisateur sur les conditions d’utilisation de l’œuvre. Ces sanctions nécessitant la collecte de données à caractère personnel provenant du fournisseur d’accès, il revient à la CNIL de vérifier que les agents mandatés ont été autorisés préalablement à procéder au traitement.

Suite à la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation et suite à la publication du décret le 17 septembre 2014, les consommateurs seront informés de la présence des DRM, une première tentative avait été menée en 2011 mais… “des amendements concernant l’information sur la présence de DRM avaient été déposés et malheureusement rejetés”.

Juridiquement, les DRMs et leurs applications protègent les titulaires des droits exclusifs, mais quand est-il des utilisateurs légitimes ?

Exemple de Contentieux :

“L’affaire date de fin 2003. L’asbl Test Achats avait assigné Emi, Sony, Universal et Bertelsmann Music Group Belgium devant le président du Tribunal de première instance de Bruxelles pour obtenir la cessation de l’utilisation de procédés techniques qui contrôlent les copies de CD’s ce qui, selon elle, porterait atteinte à l’exercice des droits des consommateurs à la copie privée. Il était demandé, en outre, de retirer de la vente les CD’s munis de ce procédé technique et constater la violation du droit à la copie privée. “ Extrait de DRM : le difficile équilibre entre utilisateurs et ayants droit par Paul Van den Bulck.

Les protections anti-copies pour les CD audio ne sont pas à proprement parler des DRM.

→ la copie est un droit dont ces dispositifs peuvent nous priver.

Restriction d’un contenu à une zone géographiqueCaptureDecranDrmYoutube

D’un pays à l’autre ce message peut apparaître. Même au sein de l’union Européenne. Les frontières sont ouvertes entre les pays membres mais pas sur internet.

Lors de l’achat de dispositif de stockage (DVD vierge, clé usb, disque dur…) il existe une taxe qui justifie l’application de l’exception au droit d’auteur (par exemple dans le cas de la copie privée). Droit qui ne peut pas être appliqué par la suite à cause des DRMs qui empêchent la copie de contenue.

La copie privée, la parodie, ou la courte citation, qui sont des exceptions au droit d’auteur, et, dans le cas de la copie privé, pour lequel le consommateur paye à chaque fois qu’il achète un support vierge (CD, DVD, cassette…) (en France), devient beaucoup plus difficile voire impossible. (Pour pousser plus loin voir les scandales liées à la taxe copie privée).

Toujours plus de solutions, toujours pas de solutions.

Problèmes dans le monde du logiciel libre et son utilisation :

Dans le cas des systèmes d’exploitation basé sur Linux et les logiciels libres, étant donné que les protocoles DRMs sont gardés secrets, propriétaire, privateur et à l’origine de nombreux brevets (et donc de procès), aucun DRMs Microsoft, Apple et autres n’a été implémenté dans ces systèmes.

De plus, certains logiciels comme la suite Open Office compatible Microsoft pourraient ne plus être compatibles car non-compatibles DRMs. Si tous les fichiers étaient protégés par des DRMs, de nombreux logiciels du monde libre ne pourraient plus avoir accès à ces fichiers sécurisés.

Conclusion :

En somme, l’application de la loi en France entre utilisateurs et ayants droits se résume à une lutte sans grande conviction mais à grand renfort de DRMs de plus en plus perfectionnés et ne faisant l’objet d’aucun contrôles.

Pour parler de chiffres Hadopi c’est, pour quelques 60 millions d’utilisateurs:

  • 32 jugements (dont une relaxe), avec à des amendes allant de 50 à 1 000 euros, assorties éventuellement de sursis.
  • 5 classements sans suite,
  • 18 rappels à la loi.

Pour finir en beauté et parce que s’est Richard Stallman (grand orateur, défenseur du logiciel libre et donc non privateur) qui le dit, « il ne faut pas acheter des produits qui ont des verrous numériques comme les DVD, sauf si tu as le programme pour les casser. »

Questionnements :

Dans le cadre de la copie privée qu’elles sont les impactes des DRMs sur son application ?

La copie privée et rendu impossible sans logiciel permettant le cassage des protections mises en place, ce qui entraîne une infraction comme le traitée de l’OMPI l’a obligé aux pays signataires.

Une copie privée d’un contenu est-elle une sauvegarde ou une contrefaçon ?

Une copie privée d’un contenu est considérée sauvegarde tant qu’elle reste privée. Quid de la copie par la même occasion du procédé antis copies (DRM).

Si l’on achète du contenu dématérialisé, comment est gérée le lègue aux enfants ? Doit on enfreindre les DRM (et donc la loi) pour donner ce type de contenus ?

La réponse varie, et vous la trouverez dans les CGU du vendeurs chez lequel vous achetez votre contenue. Certain (Apple, googleplay, la boutique mp3 Amazon…) précisent qu’ils vous vendent une licence d’utilisation vous n’êtes pas propriétaire du contenu !

Sources :

DRM : le difficile équilibre entre utilisateurs et ayants droit par Paul Van den Bulck : http://www.droit-technologie.org/actuality-929/drm-le-difficile-equilibre-entre-utilisateurs-et-ayants-droit.html

Wikipédia :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Gestion_des_droits_num%C3%A9riques

Centre nationale de ressources textuelles et lexicales, définition du mot gestion:

http://www.cnrtl.fr/definition/gestion

drm.info :

http://drm.info/index.fr.html

[numerama] L’ARMT constate son inutilité avant de devenir l’HADOPI par Guillaume Champeau:

https://www.laquadrature.net/fr/numerama%C2%A0larmt-constate-son-inutilite-avant-de-devenir-lhadopi

Les consommateurs mieux informés sur les DRM mais toujours menottés April:

https://www.april.org/les-consommateurs-mieux-informes-sur-les-drm-mais-toujours-menottes

Hadopi : plusieurs abonnés condamnés à 300 et 500 euros d’amende par Xavier Berne:

http://www.nextinpact.com/news/96525-hadopi-plusieurs-abonnes-condamnes-a-300-et-500-euros-d-amende.htm

Source images : http://geektionnerd.net/

Coécrit avec Sébastien A.

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